mardi 21 décembre 2010

COMPTE-RENDU DE LA JOURNEE DU 18-12-2010




















COMPTE-RENDU DE LA JOURNEE
DU SAMEDI 18 DECEMBRE 2010

MESSE-REPAS-CONFERENCE AUX MISSIONS ETRANGERES DE PARIS

L’hiver est arrivé tôt cette année. Les intempéries n’ont pas arrêté de s’abattre sur toute la France à l’approche de ces Fêtes de fin d’année. Le froid continuait à sévir sur Paris depuis plusieurs jours. Le jour de notre rencontre traditionnelle avec les boursiers, les membres de l’administration et les amis conférenciers, le temps n’a pas fait exception ! Nos invités ont dû affronter neige, froid et verglas pour arriver !

La plupart de nos étudiants sont venus pour la première fois participer à une célébration eucharistique. Une petite répétition de chants s’imposait pour leur permettre d’entrer dans l’atmosphère religieuse.

La cérémonie fut présidée par le Père Colomb, Supérieur Général des MEP, entourés de douze autres prêtres dont notre directeur, le Père Demolliens et le Père Troger, son prédécesseur. L’homélie du Père Colomb nous rappelait l’esprit de famille et l’amour fraternel dans le Christ.

Après la messe, tous furent invités au repas au réfectoire. Quelques étudiants ont dû partir aussitôt après pour aller reprendre leur travail. Ils avaient pris une demi-journée de congé pour passer un petit moment de fête familiale avec nous. Nous tenons à les féliciter de leur esprit de participation et de leur courage.

Un repas de fête nous attendait dans la salle. Monsieur CHAIN a pris quelques minutes pour exprimer ses vœux à l’assemblée.

Après le repas sympathique, nous sommes invités à aller assister à une conférence de Monsieur PERNOT. Notre sortie pédestre dans le marais programmée est remplacée par ce cours d’histoire à cause du trop mauvais temps. Monsieur PERNOT a préparé une projection de diapos sur l’histoire de « Cluny », capitale de l’Europe au Moyen Age. Nous avons découvert divers visages des différentes époques de cette ville monastique et ses nombreuses implantations. Il y en avait plus de 1000 sur toute la France, à travers les photos et les explications. La conférence fut passionnante et riche en images parlantes. Un après-midi entier ne serait pas assez long pour écouter toute l’histoire de ce lieu saint si cela ne tenait qu’à nous. Mais la Salle devait être libérée pour les autres activités. Nous devions nous quitter vers 16 h avec beaucoup de regret.

En cette période de fêtes, nous vous souhaitons, à vous et à ceux qui vous sont proches :


Joyeux Noël et Bonne Année 2011 !


Julie

Compte-rendu de la visite de l'Hôtel de Ville du jeudi 9 décembre 2010










COMPTE-RENDU DE LA VISITE DE L’HOTEL DE VILLE

Le jeudi 9 décembre 2010 à 9 h 30

Alors qu’une vague de froid déferlait sur toute la France depuis deux-trois jours, la température étant descendue à -2°, -3°, il a fait particulièrement mauvais le mercredi, veille de notre visite de l’Hôtel de Ville. La neige était tombée en abondance sur la capitale. Tout Paris et ses banlieues avaient connu d’importantes perturbations liées à des intempéries. Le jour de notre visite, malgré le froid et les mauvaises conditions de transports, nos étudiants sont arrivés au compte-gouttes au lieu du rendez-vous, Place de l’Hôtel de Ville. Ils n’étaient pas au grand complet, mais, ils étaient quand-même quatorze présents.

Madame Marie-France, chef du protocole du service visiteurs, nous a reçus à bras ouverts. La visite a duré deux heures. Sa patience et sa compétence furent remarquables. Elle a expliqué l’histoire de France et surtout l’histoire de Paris à nos étudiants avec des mots très simples. Elle leur a donné un temps d’écoute, un temps de questions et un temps de photos. Le dernier temps a beaucoup plu aux visiteurs, leur attention étant plus vive durant les deux autres temps.

La visite s’est terminée à 11 h 30. Ils sont tous rentrés enthousiasmés de cette visite si détaillée et intéressante. En rentrant en classe, ils ont retravaillé, posé d’autres questions sur ce qu’ils avaient vu à leur professeur.



Julie

mardi 14 décembre 2010

28ème feuille de route de Jean-Michel GALLET

Et si le volcan Toba (Indonésie) se réveillait ?

Le 23/11/2010

Feuille de route 28 : et si le volcan Toba (Indonésie) se réveillait ?
Se rendre sur l’île d’une île… Pour ce faire, partant de Bali, j’ai refranchi l’équateur pour me retrouver dans l’hémisphère nord et, plus précisement, sur l’île de Sumatra (1). De Medan, la principale ville de cette île, je me suis rendu sur les rives du lac Toba, le plus grand lac d’Asie du sud-est. Long de 100 km et large de 30 km, de forme ovale, il couvre une superficie de 1 707 km2. L’île de Samosir, c’est juste au milieu…Impressions d’un voyage effectué en juillet 2010.

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Paisibilité. C’est ce que ressent le voyageur, lorsqu’après avoir sauté du bateau sur le ponton, fait de planches brinquebalantes, du petit port de Tuk Tuk, il fait ses premiers pas sur l’île de Samosir. Le fait d’être sur une île n’est vraisemblablement pas étranger à cette impression. Sur une île, on a le sentiment d’être dans un monde à part, loin de la terre ferme et de ses contraintes.…

Ici, tout se fait de facon très décontractée. Difficile souvent de trouver le gestionnaire du magasin où l’on veut acheter une bouteille d’eau. ll est souvent attablé chez ses voisins en train de jouer une partie d’échecs ou d’un jeu qui s’apparente aux dominos… ou de faire sa sieste dans l’arrière-fonds de sa boutique…. Pas de passeport ou de quelconque document d’identification à présenter à M. Moon, le sympathique propriétaire de mon lieu d’hébergement : “je vous donne la ”maison batak” numéro 4 … Et pour la note ? : “vous paierez le jour de votre départ”... Comme à l’accoutumée, je m’enquiers, dès mon arrivée, de la possibilité de louer une moto pour parcourir l’île. Dès le lendemain, m’attendait à la porte de ma maison batak, une moto, ma foi quasi neuve. Avant d’enfourcher l’engin, je demande à M. Moon un casque comme le code le route indonésien l’impose. “Ce n’est pas nécessaire”.. “pourquoi ? (2)“ “eh bien, nous sommes aujourd’hui vendredi. Or, il n’y a que le samedi -car c’est jour de marché à Tomok, la principale ville de la côte est de l’île- qu’il arrive à la police de contrôler la circulation et de vérifier le port du casque (3)”... “Et puis” ajoute-t-il avec un grand sourire, “au pire, cela vous coûterait 10 000 roupies (4)”… évidemment pour arrondir les fins de mois du policier de service. Faut-il en conclure que les pandores de l’ile consacrent les autres six jours de la semaine à se perfectionner à la belote locale ?

Parcourir l’île est un enchantement pour tous les sens. S’émerveiller devant ses fabuleux paysages où l’eau turquoise répond aux couleurs brunes des côtes escarpées ou au vert vif des zones herbagères ou des cultures en terrasses dans une éclatante harmonie de couleurs. Respirer les effluves odoriférantes dégagées par les clous de girofle (5) séchant au bord des routes et pistes de l’île. S’émerveiller devant l’explosion des fleurs équatoriales aux formes bizarres, aux couleurs éclatantes et aux tailles inhabituelles (6). Se laisser séduire par les chants ou les accords de guitares -que tous les jeunes “gratouillent” en permanence surtout le soir, et jusqu’à une heure avancée de la nuit- qui montent de la plupart des maisons ou des places…les Bataks semblent ne pouvoir vivre sans un permanent fond musical. Saluer d’un grand “hello” les enfants (7) qui reviennent de l’école en uniforme, assez souvent nus-pieds (8) et essaient d’échanger avec vous quelques mots. Répondre aux sempiternelles questions posées à tout étranger : “ où allez-vous ?”, puis “où est votre famille ? “ (9) par les hommes attablés aux cafés (10) ou par les femmes dont les plus jeunes portent toutes à la taille, tenu par une écharpe, un bambin. Echanger mille sourires, dans un magasin, pour le moindre achat, ou pour refuser que la personne devant vous ne vous cède son tour… Le tout dans de grands éclats de rires naturels qui donnent l’impression de ne rencontrer que des gens heureux.

Et hors ses habitants, on ne rencontre, ça et là, que quelques rares touristes qui apprécient, en plus du trekking et des baignades dans les eaux fraîches du lac ou chaudes des sources, de permanents échanges de sourires dans une ambiance destressante.

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Qui sont donc les habitants de l’île ?
Cette île, peuplée de 517 000 habitants, est homogène ethniquement puisque peuplée quasi exclusivement de descendants de Bataks, un peuple vraisemblablement originaire du nord de la Thaïlande, chassé par la migration de tribus siamoises. Ils s’implantèrent alors autour du lac Toba. Ils furent “découverts” en 1783 par un voyageur britannique, William Marsden, qui rapporta avoir rencontré un royaume doté d’une culture élaborée et d’un système d’écriture.
Le relais fut rapidement pris par des missionnaires. Les premiers terminèrent leur vie peut-être dans un chaudron, le peuple batak ayant pratiqué l’anthropophagie jusque la première moitié du XIXème siècle. Un religeux luthérien allemand, du nom de Nommensen, eut plus de chance que ses prédécesseurs car son arrivée coïncida avec une série de récoltes exceptionnelles, ce qui amena le Roi Sidabutar à abandonner les croyances animistes des Bataks et à se convertir. Pasteur et Roi sont d’ailleurs enterrés, à Tomok, côte à côte, dans le cimetière royal.
Le peuple batak est donc aujourd’hui christianisé, majoritairement protestant, avec une minorité catholique. Si l’île de Samosir constitue son fief, ce peuple de cinq à six millions d’âmes s’étend autour du lac dans un rayon de 200 à 300 km, mais, là, en mixage décroissant avec les populations musulmanes de l’île de Sumatra (11).
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Est-ce la vue des temples ou des églises avec leurs clochers qui parsèment la campagne…Ici, le dimanche est un jour sacré et seulement dédié aux devoirs religieux. Les mouvements chrétiens semblent d’ailleurs être les seuls centres d’animation de la vie sociale. Est-ce la découverte de ces bâtiments traditionnels dont les deux extrémités du faîte du toit sont relevées. Est-ce l’omniprésence des buffles d’eau qui paissent paisiblement dans tous les espaces verts, menés par des enfants. Sont-ce ces paysages très accidentés et les cultures en terrasses. Est-ce l’importance de la vie rurale et agricole, la première activité économique de l’île. Ce fut, en tout cas, ma deuxième impression en séjournant, pendant une dizaine de jours, sur cette île. L’apparente similitude entre l’île de Samosir et celle de Célèbes, et plus précisement le pays Tana Toraja (12), m’a parfois fait croire que je me trouvais sur cette dernière.
Des chercheurs affirment d’ailleurs que les peuples Toraja et Batak seraient originaires des mêmes régions d’Asie, à savoir du nord de la Thaïlande, de la Birmanie et du Laos (13).
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Encore un paradis terrestre (14)?
Pour le touriste, peut-être. Mais un passage dans ce lieu enchanteur l’appelle aussi à la modestie et à l’humilité car il lui fait prendre conscience de la fragilité des choses. En effet, le lac Toba et l’île de Samosir ont pour origine une explosion volcanique, celle du volcan Toba, qui faillit faire disparaître l’humanité.
Remontons le temps..
Il y a 73 000 ans -à 4 000 ans près- notre globe terrestre aurait affronté, avec l’explosion du volcan Toba, la plus importante éruption volcanique jamais connue dans l’histoire terrestre. L’énergie libérée alors aurait eu une équivalence d’un milliard de tonnes de TNT.
Pour mieux mesurer ce que représente ce chiffre, on peut comparer l’explosion du volcan Toba à celle du volcan Krakatau (15), la plus colossale éruption volcanique des derniers siècles, qui, elle, fut mesurée scientifiquement et eut lieu, aussi en Indonésie, en 1883. Le Krakatau est une île volcanique située dans le détroit de la Sonde, à mi-distance entre Java ouest et le sud de Sumatra. Elle fait partie d’un ensemble de trois îles issues d’une précédente explosion volcanique qui avait secoué la région en l’an 535. Mais, en 1883, tout semblait alors calme. Et depuis plus de deux siècles, les trois volcans qui constituaient l’archipel de Krakatau semblaient “éteints”..
Le 27 août 1883, commence une série d’explosions. A 9h. 58 se produit la plus énorme. Elle sera perçue dans un rayon de 5 000 km. L’onde choc est si puissante que toutes les vitres volent en éclats dans un rayon de 500 km. Elle fera 7 fois le tour de la planète. Cette explosion colossale est accompagnée d’un immense raz-de-marée. On estime à 47 m. la hauteur de la vague qui, deux heures plus tard, s’écrase sur les côtes de Java et de Sumatra, soit à hauteur d’un immeuble 15 étages.. Quelques jours après l’éruption, on a remarqué une montée anormale des eaux au Mont Saint Michel et dans le golfe de Gascogne.
La hauteur du panache volcanique atteint alors 48 000 mètres. Les cendres rejetées par le volcan retombent sur une surface de 700 000 km 2. L’obscurité est totale dans un rayon de 600 km.
Après une “pause” dans ses manifestations volcaniques, le volcan Krakatau reprit des activités à partir de 1927. La dernière éruption remonte à 2009…

Pour pouvoir comparer l’énergie explosive des ces diverses éruptions (Toba et Krakatau), il faut savoir que l’énergie développée par l’éruption du Krakatau, en 1883, correspond à 10 000 bombes d’Hiroshima. Celle développée par l’éruption du même volcan en 535 aurait eu une puissance équivalente à 20 000 bombes d’Hiroshima, ce qui a alors engendré alors un hiver volcanique sur notre planète pendant plusieurs années..

Or, -mais ce ne sont certes que des hypothèses de chercheurs- la puissance développée par l’éruption du volcan Toba, il y a 73 000 ans, aurait eu une puissance qui varie, selon les experts, entre 67 000 bombes d’Hiroshima et 40 millions de bombes atomiques !!! Toute la vie végétale et animale de notre planète en fut bouleversée. Pour certains chercheurs, l’espèce humaine (homo sapiens et homme de néandertal) faillit en disparaitre. Une couche de 15 centimètres à six mètres de cendres volcaniques aurait alors recouvert le sud de l’Inde. Il est également possible que cette éruption ait formé une couche de nuages d’acide sulfurique tout autour du globe terrestre. Il en aurait résulté une baisse des températures de l’ordre de six à dix-sept degrés selon les latitudes et un “hiver volcanique” d’une durée de six ans. Concomitamment, se déroula alors une glaciation d’une durée d’un millénaire dont l’une des causes ou la cause pourrait être l’éruption du volcan Toba.
Une grande surface s’effondra au centre du cratère, formant une caldeira (16) qui se remplit d’eau, créant ainsi le lac Toba d’une profondeur de 450 mètres. Il y a 30 000 ans, le centre de la caldeira se souleva sous la pression du magma restant pour donner l’ile de Samosir.
Selon certains experts, une nouvelle explosion volcanique du Toba ne serait pas à exclure (17).
Jean-Michel Gallet
(1) l’ile de Sumatra, une des 17 500 de l’archipel indonésien, s’étend sur 1 650 km. Sa superficie est de 473 606 km2. Elle est peuplée de 40 millions d’habitants
(2) La route est un roman inépuisable. Comme dans nos pays occidentaux, existe un code de la route très complet. La différence provient de ce qu’ici l’application des dispositions réglementaires est plutôt laxiste. Ce qui peut prêter soit à sourire, soit à fermer les yeux si on est un témoin direct de leur non-respect.
En l’espèce, je voulais rejoindre par la route les rives du lac Toba en partant de Medan, la principale ville du nord de l’île de Sumatra. Je choisis la solution du minibus nettement plus pratique que celle du bus qu’il faut aller rejoindre dans une banlieue éloignée.
Après avoir entassé mon sac avec ceux des autres passagers dans l’étroit espace arrière dédié à cette fonction, je me glissais sur la banquette avant avec un autre passager et le conducteur. Ce dernier, avant de démarrer, me fit alors comprendre, avec force sourires et gestes qui se voulaient explicatifs, qu’il me fallait, l’imiter. Ce qui signifiait que je dus extirper de l’arrière de la banquette une lanière de tissu -que nous appelons habituellement ceinture de sécurité-. En l’espèce, celle du passager avant du minibus était assez longue pour ceinturer le recordman mondial de l’obésité: elle devait faire au moins trois mètres de diamètre. Mais surtout, il n’y avait plus de cliquet à hauteur du siège pour enclancher la boucle. Mais ce qui importait était que le conducteur et le passager assis à l’extrême gauche -en Indonésie la conduite se fait à gauche- semblent avoir la taille barrée d’une lanière afin de pouvoir laisser croire aux forces de police que la réglementation était respectée.
J’étais donc en première ligne pour, pendant les cinq heures du voyage, être le témoin direct des pratiques de conduite locales qui semblent obéir à une autre logique que la nôtre….
Le principe de conduite est simple : si j’ai rattrapé le véhicule qui me précède, il est “logique” que je le dépasse.. “Ah bon, il y a une ligne jaune” -éventuellement double pour une raison inconnue-…”Ah bon, il y a un virage” -et ils sont nombreux sur cette île essentiellement montagneuse dans sa partie septentrionale-. Qu’importe, je colle au véhicule qui me précède pour profiter de l’effet d’aspiration et je dépasse.. “ Ah bon, un véhicule surgit en face…”. Pas de problème…Le conducteur, le visage toujours illuminé d’un grand sourire, se tourne alors vers le passager assis le plus à sa gauche sur la banquette de devant -en l’espèce, ma personne- et le prie d’un geste ponctué d’un “window, window (fenêtre ..fenêtre)” d’abaisser le plus rapidement possible la vitre -manoeuvre qui, à ma surprise vu l’état général du véhicule- se révéla possible et d’agiter le bras gauche par ladite fenêtre.. Geste qui signifie au conducteur en voie de dépassement que nous allons nous rabattre de toute urgence.. Et, à ma grande surprise, le conducteur du véhicule en voie de dépassement obtempère. Imaginez la bordée d’injures qu’un conducteur occidental aurait émis face à cette manoeuvre. Mais dans le monde marqué par la culture hindoue-bouddhique -globalement l’Asie-, on évite systématiquement, dans les relations sociales, l’affrontement frontal avec les autres.. de là, d’ailleurs s’explique la règle de ne jamais vouloir faire perdre la face à quelqu’un
(3) dois-je préciser que ledit casque ne comportait pas de jugulaire.. une sorte de casque-casquette, peut-être pour se protéger du soleil ou de la pluie
(4) taux de change en juillet 2010 : un euro : environ 11 000 roupies
(5) le giroflier est d’origine indonésienne. Les boutons floraux, dénommés clous de girofle, sont séchés au soleil jusqu’à ce qu’ils prennent une teinte brun foncé. Le clou de girofle était traditionnellement utilisé en médicine et en cuisine. De nos jours, 95% de la production (l’Indonésie est le premier producteur mondial des clous de girofle) est utilisé pour la production des kreteks (cigarettes indonésiennes)
(6) c’est un peu plus au sud de l’île de Samosir que se rencontrent les plus grandes fleurs du monde : la rafflésie qui peut atteindre un mètre de diamètre et l’arum titan dont la fleur peut atteindre près de trois mètres de diamètre. Elles dégagent toutefois toutes les deux une odeur fort désagréable
(7) les enfants vont à l’école -confessionnelle- sur l’île de Samosir jusqu’à la fin du primaire. Ensuite, ils doivent poursuivre leurs études “sur le continent »
(8) souvent, les chaussures à la main “pour ne pas les user sur la route”
(9) en Indonésie, on aborde tout étranger par la question : “où allez-vous ? “, ce qui peut surprendre ou déstabiliser l’occidental. En réalité, cette question pourrait se traduire plutôt par notre sempiternel : “ça va? “ auquel on répond systématiquement par l’affirmative quelle que soit sa situation du moment. Demandez à quelqu’un où il va, n’a rien, dans l’esprit indonésien, d’inquisiteur. C’est d’abord une façon d’aborder la conversation. Il suffit d’ailleurs de répondre : “jalan, jalan” - c’est-à-dire “je vais mon chemin”- pour satisfaire l’apparente curiosité de votre interlocuteur..qui embraie aussitôt sur la deuxième question : “ où est votre famille ?”. Un Indonésien, comme tout asiatique (les exceptions sont rares) ne peut en effet concevoir que vous viviez seul. Si vous répondez que votre famille est restée à la maison, la curiosité de votre interlocuteur est de nouveau satisfaite et il peut, éventuellement, passer à une troisième question. Mais ce n’est pas systématique, car par les deux questions susmentionnées, il a rempli son devoir d’hospitalité et de courtoisie envers tout étranger de passage. Si, par contre, vous répondez que vous n’avez pas d’enfants parce que pas d’époux ou d’épouse, alors, se lit sur le visage de votre interlocuteur un sentiment d’incompréhension et de compassion peinées. “Comment ? vous n’avez pas assuré votre descendance ? Vous devez être bien malheureux”.. Il arrive alors qu’on vous propose de remédier à votre situation intenable en vous assurant qu’il existe “pas loin d’ici” de jolies filles qui ne demandent qu’à “faire un bon mariage” pour assurer la continuité familiale.
Ici, on nait, on se marie, on a des enfants et on meurt. Pas question de discuter les règles sociales ou de les adapter à son cas personnel. La liberté individuelle est un concept théorique -sauf pour une minorité ayant souvent vécu à l’étranger-. On imagine ces pays comme étant ceux de la Liberté -parce que le sourire fleurit en permanence sur toutes les lèvres- alors que leurs habitants sont en fait soumis à des règles sociales très strictes et, par rapport à nos valeurs, très contraignantes. Reste à savoir comment réagiront les jeunes générations, davantage formées intellectuellement, face à ces règles
(10) seuls les hommes fréquentent les cafés..aux femmes, une grande partie des travaux des champs et les soins aux enfants
(11) Au nord cette zone “mixte” -où Bataks et autres ethnies musulmanes se mêlent- se trouve la province d’Aceh, région qui paya un lourd tribut au tsunami de décembre 2004 (170 000 victimes) et fief des intégristes musulmans. La province d’Aceh se veut en effet la région qui, au sein de l’archipel indonésien, se convertit la première à la religion musulmane, et ce, dès le XIIIème siècle. Et surtout, elle a toujours été tentée par le séparatisme par rapport au reste de l’île.
Ainsi, en 1953, le parti islamique y instaura une République islamique, refusant que les Acehnais soient réunis dans la même province que les chrétiens bataks. S’ensuivit une période de quasi guerre civile jusqu’à ce que le pouvoir central indonésien accorde à Aceh, en 2002, un statut d’autonomie spéciale. En réalité, l’autonomie ne fut effective qu’à partir de 2005 après quelques années de troubles. Cette autonomie permit aux autorités locales de mettre en oeuvre la charia. Ainsi, en application d’une loi votée en septembre 2009, a été introduite la peine capitale pour adultère. Plus prosaïquement servir de la bière à un musulman expose son auteur à une peine de 40 coups de fouet. En principe, ce châtiment n’est pas applicable aux non musulmans.
Le reste de l’île de Sumatra, à majorité musulmane, applique une religion exempte des rigueurs du rigorisme acehnais
(12) voir feuille de route 24 : “ Tana Toraja : une religion face au mystère de la mort”
(13) mais les points communs entre pays Toraja (Célèbes) et pays Batak (Sumatra) s’arrêtent là. Ici, sur l’île de Samosir, la vie culturelle antérieure batak a quasiment disparu. Certes, dans des cas extrêmes, se maintiendraient quelques croyances animistes, comme par exemple, des pratiques de magie ou un culte rendu aux esprits des ancêtres.
Mais, à la différence de ce qui se passe en pays Toraja, en pays batak tout semble “normalisé”. Ici, pas de “religion du buffle”. Les animaux travaillent dans les champs comme toute bête de somme et ne font l’objet d’aucun culte particulier. Ici, les défunts sont enterrés quelques jours après leur décès après une cérémonie religieuse à l’Eglise ou au temple et non, comme en pays toraja, parfois des années après leur mort (en septembre 2010, en pays toraja, j’ai rencontré une dame qui avait, l’année précédente, enterré sa grand-mère décédée 25 ans auparavant. La famille en d’ailleurs profité pour inhumer, lors de la même cérémonie, la fille et une soeur de la défunte toutes deux décédées entre temps) et dans le cadre de cérémonies spécifiques, loin des rites chrétiens. Ici, sur l’île de Samosir, les bâtiments de forme “tongkonan” aux deux extrémités du toit relevées servent soit de sépulture ou, surtout sur la côte sud de l’île, de maisons d’habitation, mais ces dernières n’ont plus de fonction spécifique comme en pays toraja, à savoir être le symbole de “la maison du seigneur des lieux“ dans le cadre d’une société de castes. En conséquence, l’orientation des tongkonans batak n’obéit à aucune règle alors qu’en pays toraja, le tongkonan est toujours orienté vers le nord. Ici, ils servent tout simplement de foyer familial, ne sont pas divisés en trois espaces, mais n’ont qu’une seule pièce -avec souvent une sorte de mezzanine pour la “chambre” des parents-.
Comment expliquer cette disparition de la culture batak à la différence de ce qui se passe en pays toraja ?
Quand on parcourt le pays batak, la pauvreté de ses habitants saute aux yeux. Ici, la quasi totalité de la population vit de l’agriculture et de la pêche. L’habitat est spartiate. Les vêtements usagés. Très rares sont ceux qui possèdent un véhicule.
A l‘inverse, le voyageur qui parcourt le pays Tana Toraja est frappé par la qualité de l’habitat. Dans la quasi totalité des villages surgissent de nouvelles constructions. L’habillement est en général de qualité -voire de marque-. L’équipement des maisons, notamment en électro-ménager, est généralisé. Le parc motocycliste et automobile relativement développé. Et surtout, les habitants financent des cérémonies liées aux funérailles fort onéreuses…
Pourquoi cette différence de niveau de vie ?
Les populations de l’île de Samosir et du pays Tana Toraja sont à peu près équivalentes en nombre (environ 500 000 personnes dans les deux cas) et la totalité des peuples batak et toraja à peu près équivalente (5 à 6 millions de personnes). Les superficies des territoires concernés quasi identiques.
Mais il existe une différence fondamentale entre ces deux populations : nombre d’habitants du Tana Toraja ont migré vers des pays plus ou moins lointains en Indonésie elle-même (Java, Kalimantan, Papouasie, etc..) et à l’étranger (Malaisie, Etats-Unis, Australie, etc..). Par contre, la population batak a toujours vécu refermée sur elle-même (il y a quelques siècles les villages batak n’étaient reliés par aucun pont et les sentiers de liaison étaient cachés pour éviter les incursions étrangères).
L’actuelle richesse du pays Toraja n’est donc pas due aux potentialités du pays (il est difficile de vivre des ressources naturelles du pays), mais à l’argent des “émigrés”. Ce sont eux qui financent les nouvelles constructions et les traditionnelles cérémonies religieuses…
Rien de tout cela en pays batak qui vit toujours sur ses maigres ressources propres. Et aujourd’hui, ses habitants estiment qu’ils n’ont plus les moyens de financer des pratiques culturelles coûteuses. Une fois le financement des besoins primaires assuré (habitat et nourriture), le reste est maintenant consacré à l’éducation des enfants, voire au financement de nouvelles dépenses (portable, téléviseur, etc..). Evidemment au détriment des aspects culturels…
(14) à condition toutefois que le soleil soit de la partie, ce qui n’est pas toujours évident. Il est vrai que le lac de Toba est une région plutôt humide. Le relief en serait la cause. En effet, le lac est entouré de zones montagneuses et l’île de Samosir consiste en une mince bande côtière -et encore pas sur l’intégralité de son pourtour- et d’une zone de montagne en son centre. Mais en principe, les mois d’été correspondent à la “saison sèche”. Or, le mois de juillet 2010 fut particulièrement arrosé, il est vrai pas seulement sur l’ile de Sumatra, mais sur toute l’Asie du sud. Et pourtant, en cet été 2010, le niveau des eaux du lac Toba était d’un à deux mètres inférieur à celui qu’il aurait du être à cette époque de l’année. La faute à une faible pluviométrie pendant la saison des pluies (hiver 2009-2010). Hasard climatique? Déréglement du au réchauffement climatique ou aux phénomènes climatiques maritimes El Nino ou La Nina ? J’ai entendu toutes les hypothèses.. et la sempiternelle conclusion : “ y’a plus de saisons »
(15) voir notamment “la Gazette de Bali”– août 2010 : “ Le Krakatau de 1883 “
(16) une caldeira (de l’espagnol/portugais : chaudron) est une vaste dépression à fond plat située au sommet de certains volcans et entourée d’une falaise circulaire souvent haute de plusieurs centaines de mètres. Une caldeira n’est pas un cratère, mais résulte de l’effondrement de la chambre magmatique d’un volcan le long d’une faille circulaire. Cela signifie que plus la caldeira est importante, plus la chambre magmatique était importante
(17) et pourrait causer des millions, voire davantage, de morts surtout si les cycles végétatifs sont totalement perturbés

27ème feuille de route de Jean-Michel GALLET

Feuille de route 27 : connaissez-vous la “ sambah” balinaise ?

Traditionnellement, à Bali, on danse le kecak(1), le barong (2), et surtout le legong (3). Pas la samba(h). En réalité, la “sambah “ est le nom donné à un festival qui, chaque année, en mai ou en juin, se tient à Tenganan, un village situé au sud-est de l’île. Festival dont le point d’orgue est la tenue d’un “jeu-combat” intitulé “pandanus sambah”. Mais pourquoi “pandanus” ?

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“ Bonjour. Heureux de te savoir de retour à Bali….Je te conseille d’aller à Tenganan, le week-end prochain, pour assister à des combats”. Ainsi était libellé le courriel qu’Andi Suscirta, un ami médecin balinais, également passionné de photos (4), m’a envoyé dès mon arrivée dans cette île qui, en dépit de nuisances croissantes (5) liées à l’évolution économique et sociale et à un afflux massif de touristes (6), conserve un charme et un attrait incomparables (7).
Mais Tenganan, ce n’est pas vraiment Bali. Ou plus exactement, Tenganan se veut une particularité dans cette particularité que représente Bali au sein de l’archipel indonésien, une sorte de village d’Astérix en somme (8). Le village et ses environs ont en effet été peuplés par les Bali Aga qui se définissent comme les habitants originels de Bali, bien avant que le royaume javanais hindou-bouddhique mojapahit n’étende son influence sur l’île au XIIIème siècle (9). Leur origine répond à une
légende (10). Aujourd’hui, ils vénèrent la nature et le culte de leurs ancêtres, en y ajoutant des croyances hindouistes. Ils font de leur spécificité dans l’ensemble balinais leur raison d’être.

Et parmi ces spécificités, il est une tradition, celle d’une “fête” -sembah- qui, alors qu’arrive la saison sèche, va durer dix jours et se terminer par un “jeu-combat” dénommé “pandanus sambah”.

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Pendant la durée de la fête, les habitants se parent de leurs habits traditionnels, à savoir pour les hommes, un simple sarong. Il devrait en être de même pour les femmes. Mais l’évolution des moeurs, et vraisemblablement l’action des pasteurs et prêtres hollandais, leur ont fait adjoindre une pièce de tissu qui couvre la poitrine (11). Quant aux jeunes filles, pour le festival, elles revêtent des habits brodés aux vives couleurs.
L’avant dernier jour, dès potron-minet, nombre de porcs du village voient leur dernière heure arriver. Ca et là, on entend les grognements des bêtes entravées en attente de leur dernière heure. Et si les coqs
font retentir devant chaque maison des cocoricos stridents, c’est vraisemblablement pour se donner du courage pour les combats qui vont les opposer en fin de matinée alors que les porcs abattus commencent à se transformer en saté (12) et que bouillonnent d’immenses chaudrons remplis de
légumes et d’épices divers.

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Arrive le dernier jour. Toute la matinée, des chaudrons géants ont continué à fumer et saucisses et satés à remplir de pleins paniers. Les femmes se rendent dans un temple pour y faire bénir les offrandes qu’elles offriront ensuite lors d’une procession qui doit parcourir tout le village.
Celle-ci débute un peu avant midi. Au pied du temple principal, se rassemble la foule de tous les villageois. Elle s’organise lentement en un long cortège. En tête, on trouve de jeunes habitants portant moult oriflammes. Ils sont suivis par les prêtres. Viennent ensuite, une fleur à l’oreille, les hommes habillés en guerriers, puis les femmes portant, comme partout, les offrandes sur leur tête. Cette procession fait le tour de tous les temples du village pour s’attirer les bienfaits des divers Dieux tutélaires. Au cours de cette marche, viennent se placer en tête du cortège des habitants du village en transe. Certains hommes frappent leur poitrine d’un kriss (13). L’absence de blessure démontre qu’ils sont en relation avec les Dieux protecteurs.
La procession terminée, chacun va se rassasier dans son logis. Chaudrons vidés et barbecues éteints, peuvent alors commencer, vers 15 heures, les combats de “pandanus sambah”.
Les hommes, torse nu, se rassemblent sur une sorte de ring sous les yeux admiratifs des dames et surtout des jeunes filles en tenue d’apparat. Des bambous remplis - à défaut de “ potion magique”- d’alcool de riz ou de vin de palme- sont amenés. Leur contenu est déversé dans des cônes faits de feuilles de bananier et généreusement distribué à chaque combattant dont certains n’ont qu’une dizaine d’années.
Sur le ring sont apportés des boucliers et des bouquets de « pandanus ». Le pandanus -qui a donné son nom à ce jeu-combat- est une variété de plante tropicale (14) dont les feuilles sont pourvues d’épines. Chaque combattant se munit alors, dans une main, d’un “bouquet” fait de feuilles de pandanus assemblées et, de l’autre, d’un bouclier.
Le “jeu” consiste à bloquer son adversaire avec le bouclier et un bras, et, avec l’autre, à frotter vigoureusement avec le bouquet de pandanus -en principe- le dos de l’adversaire jusqu’à ce que celui-ci, sous l’effet de la douleur crie grâce. Des “arbitres” viennent départager les adversaires avant que les dos ne deviennent trop sanguinolents.
Pendant la durée de tous les combats, en arrière-fonds, retentit, de façon lancinante et répétitive, le son des gamelans et des cymbales censés encourager les combattants et rythmer les frottements sur le dos de l’adversaire.
Tout autour des lutteurs s’est rassemblée la gent féminine, et au premier rang, les jeunes filles. Leurs glapissements admiratifs et les clins d’oeil échangés sont censés encourager leur favori.
Chaque joute terminée, les adversaires se congratulent avec force sourires et rires. Dos et épaules, voire le visage, sont parcellés d’épines. Mais qu’importe. La tradition a été respectée. Chacun a pu démontrer sa virilité. Et surtout l’adrénaline a été déchargée.
Les combats terminés, environ deux heures plus tard, les habitants se retrouvent au temple principal pour une partie plus récréative. Des jeunes filles interprètent alors, jusque la tombée de la nuit, des danses traditionnelles de legong (3).
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Le spectacle du “pandanus sambah” rappelle celui d’autres combats que l’on peut découvrir en Indonésie.
Ainsi, sur l’île de Célèbes, et plus précisément au pays Tana Toraja, on découvre, lors des cérémonies funéraires, ce combat appelé “sisemba” ou “jeu de coups de pied” (15).
Ou sur l’île de Sumba, où, au printemps de chaque année, s’affrontent, à cheval, lors de la “pasola” des cavaliers, parfois avec une grande brutalité.
Dans tous les cas, on découvre une violence qui jure avec l’hospitalité et le sourire habituel des habitants.
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Ces “jeux-combats” participent, en fait, à l’équilibre sociétal des communautés en jouant le rôle de “soupapes d’échappement”. Et leur violence est d’autant plus affirmée que la pression sociale est forte.
Car, contrairement à ce qu’affirment certains, les sociétés traditionnelles vivent dans des cadres sociétaux très rigides. Le “sauvage vivant librement” est un mythe. Tout est codifié et strictement réglementé dans ces sociétés (16), y compris dans le domaine que nous qualifions de sphère privée.
Ces rigidités sont la conséquence logique de conditions de vie fort difficiles et fort aléatoires. Seule une communauté soudée autour des règles strictes peut survivre. Ce poids ne peut toutefois que générer des névroses. Chacun ressent le besoin de temps de “liberté”, voire de “licence” pendant lesquels ce qui n’est pas permis habituellement est possible dans le respect, toutefois, de certaines normes définies par les autorités supérieures et les Dieux.
Nos sociétés occidentales connaissent-elles de telles soupapes ? Ce rôle était traditionnellement notamment dévolu aux carnavals. L’évolution de nos sociétés a eu tendance à reléguer ceux-ci au rang de survivances du passé, même si leur rôle tend à renaître au travers de “parades” ou autres événements de foule... Le “temps des vacances” où il est permis de faire ce qu’on ne peut faire le reste de l’année joue également ce rôle de “soupape”. Le “phénomène” football ne doit-il pas être examiné aussi sous cet angle (17) ?

Jean-Michel Gallet




(1) le kecak est une danse vocale (pas d’instruments de musique) exécutée par un choeur d’hommes assis en cercles concentriques qui entrent en transe en psalmodiant “chak-achak-a-chak”, imitation des cris d’une bande de singe
(2) le barong est une danse qui représente une bataille entre le bien (Barong) et le mal (Rangda). Barong est une créature mi-chien mi-lion tandis que Rangda, veuve-sorcière, pourvue d’une langue démesurée et de canines saillantes, est le mal personnifié.
Lors de l’exécution de la danse-combat, les partisans de Barong, armés de kriss (épée traditionnelle- voir point 13) sont amenés en transe par Rangda qui les pousse à se poignarder eux-mêmes. Heureusement, Barong jette un sort qui empêche les kriss de les blesser. Un pemangku (prêtre chargé du temple -voir feuille de route 20 : “crémation à Bali”-) intervient alors pour mettre fin à la transe des danseurs et sacrifie un poulet pour chasser les esprits maléfiques
(3) le legong est exécuté par des jeunes filles. Il se caractérise par une chorégraphie faite de postures contraignantes, d’enchainements complexes de pas et de jeux de mains et de doigts et de regards. C’est la plus gracieuse des danses
(4) voir les sites web d’Andi Suscirta : http://andisuscirta.com et http://www.flickr.com
(5) à Bali, la circulation est devenue un enfer en voie de “gangrénisation”. Il y a quelques années, seul le sud de l’île -c’est-a-dire la zone la plus touristique- était touché. Aujourd’hui, ce phénomène s’étend aussi au centre de l’ile (région d’Ubud). A chacun de mes séjours balinais, je lis, dans la presse locale, que les autorités sont décidées à “trouver des solutions au problème de la circulation”, notamment en construisant des parkings en périphérie des villes, pour éviter que les véhicules, et surtout les autobus, n’entrent dans les rues étroites des cités. Mais, bien peu est fait et la situation s’aggrave chaque année.
Quant à la règle qui, jusqu’à une date récente, s’imposait à toutes les constructions (à savoir ne pas construire de bâtiments d’une hauteur dépassant celle d’un cocotier -voir feuille de route 14 : “Bali, l’enchanteresse”-), elle souffre d’exceptions croissantes. Des “barres” du type de celles qu’on s’emploie à démolir dans nos cités surgissent ça et là.. avec une hauteur qui dépasse celle d’un cocotier..à moins que le génie balinais n’ait récemment découvert une nouvelle variété géante de cet arbre.
Enfin, se posent avec une acuité croissante des problèmes d’approvisionnement en eau et surtout en traitement de l’eau et des déchets.
En réalité, ce dont a besoin l’île, ce ne sont pas des “solutions à la petite semaine”, mais d’une politique globale des transports dans le cadre d’une politique globale d’aménagement du territoire organisant notamment la répartition du foncier entre les deux grandes activités économiques de l’île : l’agriculture et le tourisme. A défaut, la “bulle immobilière” dont profitent largement certains Balinais continuera à croître..et chacun sait que le destin des “bulles” est d’éclater tôt ou tard
(6) Bali a une superficie de 5 632 km2 -soit un département français “moyen”- et une population de 3,9 millions d’habitants. En 2009, l’île a reçu plus de 6 millions de visiteurs dont 2,2 millions d’étrangers (le solde correspond au nombre d’Indonésiens ayant visité Bali l’année dernière). Les Australiens, avec 20 %, avaient représenté le premier contingent de touristes étrangers. Les Français, en nette augmentation en 2009 (+ 33%), étaient le 7ème pays en nombre de visiteurs (114 000) et le premier pays européen.
Il est impossible, au moment où ces lignes sont écrites, de connaitre avec certitude les chiffres pour 2010. Si toutefois on fait une projection à partir des tendances observées les neuf premiers mois de cette année, le nombre de touristes pourrait s’élever en 2010 à sept millions de visiteurs dont 2,48 millions d’étrangers. Ce dernier chiffre toutefois recèle des évolutions par rapport à 2009. Ce sont les Australiens (estimation 2010 : + 48,5 %) qui permettent cette sensible augmentation de la fréquentation. Par contre, tous les autres pays du monde, exception faite du Royaume-Uni (+ 16,2 %) et des Pays-Bas (+8,25 %), ont une fréquentation soit stable, soit en légère baisse par rapport à 2009. Ainsi, le nombre de touristes français serait en légère baisse par rapport à celui de 2009 (moins 2,8 %), faisant rétrograder notre pays de la 7ème à la 8ème place. Il est vrai que, pour les touristes de la zone euro, jusqu’à la fin de l’été 2010, le pouvoir d’achat de leur monnaie avait baissé de 25% en un an…en 2009, l’euro s’échangeait à 14 000 roupies (monnaie locale) et, lors de l’été 2010, à 11 000 roupies.. et comme l’afflux touristique a fait monter fort sensiblement les prix depuis deux à trois ans, Bali est devenue une destination plus chère que d’autres pays du sud-est asiatique. Enfin, comme partout, on note une tendance au raccourcissement de la durée des séjours et à la baisse du montant des dépenses effectuées
(7) Bali reste un des rares exemples de pays entré dans le 21ème siècle où les traditionnelles valeurs qui sous-tendent la société depuis des siècles sont toujours vivantes. Pour l’instant (mais rien ne peut présager du futur et des choix des nouvelles générations), le “ciment” qui soude les Balinais regroupés au sein de communautés -dénommées banjars- (voir feuille de route 20 : “crémation a Bali”) continue à tenir : l’argent reste encore et d’abord un moyen d’honorer les temples et les Dieux. Pour Thierry, un ami Français, installé à Ubud, depuis 5 ans : “ Bali, culturellement, c’est la Corse”
Pourquoi la culture balinaise résiste-t-elle apparemment mieux que d’autres cultures à la vague d’uniformisation de la mondialisation ?
A mes yeux, plusieurs raisons peuvent expliquer cette réalité.
D’abord, nous sommes sur une île, et comme partout, l’insularité préserve les traditions.
Ensuite, Bali est une île où la majorité des habitants est issue de Java, île où l’élite hindouiste a voulu, notamment au XVème siècle, échapper à l’islamisation. La religion est donc de l’essence même de l’île et sa raison d’être.
Enfin, les habitants ont su, grâce au tourisme, trouver un moteur “économique” qui contribue au maintien des traditions et qui d’ailleurs ne peut fonctionner que si les traditions sont conservées
(8) Tenganan est habité par des descendants des Bali-Aga, premiers habitants de Bali avant l’arrivée des Javanais (de Java-est) dans l’île vers les X-XIèmes siècles et celle surtout du puissant royaume Mojapahit au XIIIème siècle (voir point 9). L’habitat est resté inchangé : le village de Tenganan reste encore aujourd’hui un village-rue, tel qu’il existait avant l’hindouisation. Le tourisme est, là aussi, la principale activité économique. Le village vit essentiellement de la production et de la vente de produits artisanaux, tels cette étoffe “magique” supposée protéger ceux qui la portent de la magie noire. S’est également maintenue comme artisanat local la transcription d’événements culturels sur des feuilles de lontar -le lontar est un arbre qui ressemble au cocotier-. Ses feuilles, coupées selon un format rectangulaire et desséchées, servent de support pour écrire les textes sacrés de calendriers balinais ou des extraits des chants épiques traditionnels (Rayamana)
(9) le royaume de Majapahit (ou Mojopahit) était situé dans la partie orientale de l’ile de Java. Né au Xème siècle, il étendit progressivement son influence sur une grande partie de l’archipel indonésien et sur Bali à partir du XIIIème siècle. Il connut son apogée entre 1350 et 1389 et était alors le plus puissant des royaumes javanais de la période hindou-bouddhique. Vers la fin du XVème siècle, des guerres de succession affaiblirent le royaume. En 1527, le royaume passât sous le contrôle d’un sultan qui amena la religion musulmane. La plupart des princes javanais vassaux du royaume Majapahit se réfugièrent alors à Bali
(10) selon cette légende, de nombreux siècles avant la conquête hindoue-bouddhiste javanaise -donc avant les X-XIème siècle-, le cheval préféré du Roi de Bedulu (capitale du puissant royaume balinais situé près d’Ubud et dernier royaume à résister aux Javanais de Mojopahit) s’échappa. Le Roi envoya alors des groupes d’hommes dans toutes les directions à la recherche de l’animal. Un de ces groupes, originaire d’un lieu appelé Tenganan partit vers l’est et découvrit l’étalon mort. En remerciement, le Roi proposa à leur chef de choisir une récompense. Ce dernier demanda d’obtenir un terrain correspondant à la surface imprégnée de l’odeur du corps décomposé. Le Roi ordonna alors à son officier doté de l’odorat le plus fin de se rendre sur les lieux et de délimiter les nouvelles terres de la communauté de Tenganan. Mais arrivé sur les lieux, il lui sembla que l’odeur le poursuivait. Après avoir marché des jours et des jours, l’officier déclara que les terres étaient suffisamment vastes pour installer la communauté de Tenganan. Quand l’officier fut parti, le chef du village sortit de dessous ses vêtements une pièce de viande faisandée découpée de la carcasse (source : Bali Authentique : “comment le village Bali Aga de Tenganan a obtenu ses terres”)
(11) dans la tradition hindouiste, le corps de chaque être ressemble à la cosmogonie : la tête -c’est-à-dire le haut comme les montagnes- est sacrée; le tronc représente la terre nourricière et est à découvert pour les deux sexes; le reste est “impur” comme l’eau et les profondeurs de la terre et doit être recouvert par un sarong : impensable d’entrer dans un temple sans ce dernier vêtement (voir feuille de route 20 : “crémation a Bali”)
(12) le saté est une préparation culinaire très répandue en Indonésie. Il s’agit de brochettes de viande marinée. Elles sont accompagnées de riz, de légumes et d’une sauce
(13) le kriss, sorte de long poignard, de forme ondulée -avec des courbes toujours en nombre impair- ou droite, se retrouve dans toutes les cultures de l’Asie du sud-est (du Viet nam à l’Indonésie en passant par la Thaïlande) depuis plus de deux millénaires. Par contre, il est étranger à la culture indienne. Son culte fait donc partie du patrimoine culturel de cette région et a survécu à l’hindouisation et même à l’islamisation de l’Indonésie.
Il existe deux types de fabrication de kriss :
- le kriss “classique” fait de fer, d’or, d’argent et de cuivre et aujourd’hui de nickel. Originaire de l’ile de Sulawesi (Célèbes), c’est le type le plus répandu dans toute l’Indonésie, y compris à Bali
- le kriss de Jojakarta (est de Java) qui incorpore un petit morceau (à raison d’un gramme par kriss) d’une météorite tombée au 18ème siècle à Prambanan (Java est) afin de montrer le lien entre le ciel et le kriss. C’est ce type de kriss qui est remis encore aujourd’hui, à chaque sultan de Jojakarta (Java est). Car chaque sultan doit posséder son kriss personnel pour être protégé des mauvaises influences pouvant survenir durant son règne
Le kriss n’est pas qu’une simple arme. C’est d’abord et surtout un objet doté d’ondes mystérieuses liées à sa fabrication.
Ainsi, un kriss ne peut être fabriqué que certains jours propices. Achevé, il doit recevoir une bénédiction spéciale et doit toujours être traité avec grand respect. Les forgerons (pande en indonésien) capables de fabriquer des kriss ont toujours bénéficié d’un statut spécial dans l’ordre des castes. Ils ont leurs propres temples et considèrent Brahma (le Dieu associé au feu) comme le Dieu supérieur.
Les pouvoirs magiques d’un kriss résultent donc de sa fabrication et de la relation entre le kriss et son détenteur. Ainsi, avant de faire fabriquer un kriss, il est essentiel de donner son jour et son heure de naissance. Sinon, le détenteur du kriss risque de devoir affronter des ondes négatives. En outre, son détenteur, pour pouvoir garder les ondes bénéfiques, doit faire chaque année une offrande spécifique à un jour déterminé en fonction du calendrier balinais
(14) le pandanus est une plante tropicale très répandue et très utilisée en Asie comme condiment en cuisine ou pour fabriquer des huttes. Sa fleur sert à fabriquer une huile essentielle. On compte 600 variétés de pandanus
(15) voir feuille de route 24 : “ Tana Toraja – une religion face au mystère de la mort”. La “sisemba” consiste à frapper l’adversaire avec la plante des pieds et à essayer de lui faire perdre l’équilibre. Ce “jeu-combat’ est un succédané du “sibamba”, un jeu-combat beaucoup plus violent qui était pratiqué autrefois par les jeunes et les hommes sur l’ile de Célèbes jusqu’à ce que les autorités coloniales hollandaises l’interdisent au début du siècle dernier. Lors du sibamba, les combattants s’affrontaient armés de bouts de bois. Selon certains chercheurs, le sibamba serait toujours pratiqué dans des régions reculées du Tana Toraja, les bâtons étant toutefois généralement remplacés par des tiges de palmiers (voir “les Torajas d’Indonésie” – Franck Michel – éd. Histoire et Anthropologie)
(16) ainsi, chez les Bali Aga, à Tenganan, il est interdit de se marier en dehors de la communauté. Sinon, on est exclu de celle-ci. A côté de Tenganan, se sont ainsi créés des villages composés de ces “exclus”. Pour éviter l’endogamie, à l’intérieur du village de Tenganan, les mariages sont strictement réglementés
(17) reste que le monde de l’entreprise, dans les pays occidentaux, ne connait pas de tels temps de “respiration”.... et que dire du couple ?